Isotopes

En France (mais aussi en Europe), le nucléaire est la base de notre énergie et donc de notre mode de vie actuel. Je m’y suis intéressé fortement dans le cadre du projet Rêves et Isotopes. Et j’ai commencé par faire des recherches autour des matières mêmes qui permettent l’existence de cette technologie, entre éléments nucléaires et conséquences hors de l’échelle temporelle humaine.

Isotope

Un isotope [1][2] est une variante nucléaire d’un élément chimique déterminé, il possède le même nombre de protons et d’électrons, mais a un nombre de neutrons différent. Deux isotopes d’un même élément chimique auront les même propriétés chimiques, mais des propriétés nucléaires différentes. Un isotope est désigné par son nombre de masse[3] ( la somme des protons et des neutrons). Certains isotopes sont radioactifs d’autres non.

Prenons l’exemple de l’hydrogène, un élément chimique[4] de symbole H et de numéro atomique 1. Le deutérium[5] est un isotope de l’hydrogène, il possède un proton est un neutron, son nombre de masse est égal à 2, il peut aussi être désigné par 2H ; il n’est pas radioactif. Le tritium[6] est un autre isotope de l’hydrogène, il possède 1 proton et 2 neutrons : son nombre de masse est donc de 3, il peut être désigné par 3H ; il est radioactif.

Tous les isotopes ne sont pas radioactif, mais certains le sont naturellement et d’autres non[7].

Isotopes naturellement radioactifs

  • 3H — Tritium 3 ;
  • 10Be — Béryllium 10 ;
  • 14C — Carbone 14 ;
  • 40K — Potassium 40 ;
  • 50V — Vanadium 50 ;
  • 87Rb — Rubidium 87 ;
  • 113Cd — Cadmium 113 ;
  • 115In — Indium 115 ;
  • 123Te — Tellure 123 ;
  • 138La — Lanthane 138 ;
  • 142Ce — Cérium 142 ;
  • 144Nd — Néodyme 144 ;
  • 147Sm — Samarium 147 ;
  • 148Sm — Samarium 148 ;
  • 149Sm — Samarium 149 ;
  • 152Gd  — Gadolinium 152 ;
  • 176Lu — Lutécium 176 ;
  • 174Hf — Hafnium 174 ;
  • 180mTa — Tantale 180m ;
  • 187Re — Rhénium 187 ;
  • 186Os — Osmium 186 ;
  • 190Pt — Platine 190 ;
  • 204Pb  — Plomb 204 ;
  • 209Bi — Bismuth 209 ;
  • 232Th — Thorium 232 ;
  • 231Pa — Protactinium 231 ;
  • 234Pa — Protactinium 234 ;
  • 234U — Uranium 234 ;
  • 235U — Uranium 235 ;
  • 238U — Uranium 238.

Certains isotopes radioactifs sont créés par l’homme à des fins civiles (médicales, énergiques) mais aussi à des fins militaires. De plus, certains isotopes sont le résultat (fortuit) d’un processus d’irradiation que l’on appelle l’activation neutronique[8]. On retrouve ces produits d’activation[9] principalement dans les installations nucléaires

Produits d’activation

  • 55Fe — Fer 55 ;
  • 60Co — Cobalt 60 ;
  • 63Ni — Nickel 63 ;
  • 14C — Carbone 14 ;
  • 36Cl — Chlore 36 ;
  • 54Mn — Manganèse 54 ;
  • 134Cs — Césium 134 ;
  • 152Eu — Europium 152 ;
  • 154Eu — Europium 154 ;
  • 155Eu — Europium 155.

Un isotope peut être un produit de fission[10], c’est à dire un élément artificiellement créé lors de réactions nucléaires (au sein d’un réacteur nucléaire, par exemple). De plus, un isotope peut se caractériser par la durée de sa demi-vie : cela correspond à la période radioactive[11] (appelée aussi période). La période équivaut au temps nécessaire pour que la moitié des atomes se désintègrent naturellement, ce qui fera perdre à l’isotope son caractère radioactif.

Nous pouvons classer les différents isotopes en fonction de la durée de cette demi-vie en deux catégories principales : les produits de fission à vie moyenne et les produits de fission à vie très longue, hors échelle historique ( tableau des isotopes[12])

Produits de fission à vie moyenne (demie-vie inférieure à 100 ans)[13]

  • 85Kr — Krypton 85 — (période : 10,76 a) ;
  • 90Sr — Strontium 90 — (période : 28,9 a) ;
  • 113Cd — Cadmium 113 — (période : 14,1 a) ;
  • 121mSn — Étain 121m — (période : 43,9 a) ;
  • 137Cs — Césium 137 — (période : 30,23 a) ;
  • 151Sm — Samarium 151 — (période : 90 a) ;
  • 155Eu — Europium 155 — (période : 4,76 a).

Produits de fission à vie très longue hors échelle historique[14]

  • 135Cs — Césium 135 — (période : 2,3 Ma) ;
  • 93Zr — Zirconium 93 — (période : 1,53 Ma) ;
  • 99Tc  — Technétium 99 — (période : 0,211 Ma) ;
  • 129I — Iode 129 — (période : 15,9 Ma) ;
  • 107Pd — Palladium 107 — (période : 6,5 Ma) ;
  • 126Sn — Étain 126 — (période : 0,1 Ma) ;
  • 79Se — Sélénium 79 — (période : 0,28 Ma).

Intéressons nous maintenant à des éléments chimiques qui sont le fondement de la technologie nucléaire civile et militaire.

L’uranium[15]

Naturellement l’uranium est radioactif (période de 4,4688 Ga). Dans la nature l’isotope 238U est le plus abondant à 99,2% contrairement à l’isotope 235U qui n’est présent qu’à hauteur de 0,72% (période de 703,8 Ma). Mais c’est justement cet isotope 235U qui est recherché pour ses usages militaires ou civils. Un réacteur nucléaire fonctionnant à l’uranium utilisera l’uranium faiblement enrichi à 3-4% d’235U, contrairement à un usage militaire qui requiert de l’uranium enrichi[16] à 80-90% d’235U.

Le plutonium[17]

L’isotope 239Pu est créé à partir de l’uranium 238 au sein d’un certain type de réacteur nucléaire appelé surgénérateur[18]. Ce plutonium obtenu a principalement été utilisé dans le cadre militaire pour la création des bombes A et H[19].

Le MOX[20][21]

Le MOX est un combustible nucléaire composé de 7% de 239Pu et 93% d’238U (uranium appauvri). Ce mélange permet d’utiliser le plutonium dans un cadre civil. Il est utilisé dans 20 des 58 réacteurs français. Le MOX est beaucoup plus radioactif et radiotoxique qu’un combustible à base d’uranium enrichi et il est donc plus dangereux à transporter et à mettre en œuvre. De plus à l’heure actuelle le retraitement du MOX usagé n’est pas mis en place car trop complexe.

Réacteurs français utilisant le combustible MOX :

  • centrale nucléaire de Saint-Laurent — 2 réacteurs ;
  • centrale nucléaire de Gravelines — 4 réacteurs ;
  • centrale nucléaire de Dampierre — 4 réacteurs ;
  • centrale nucléaire du Blayais — 2 réacteurs ;
  • site nucléaire du Tricastin — 4 réacteurs ;
  • centrale nucléaire de Chinon  — 4 réacteurs.

Trois réacteurs suisse utilisent le combustible MOX :

  • centrale nucléaire de Gösgen ;
  • centrale nucléaire de Beznau.

Certains radioisotopes[22] peuvent être relâchés dans le milieu naturel suite à des accidents ou à cause du fonctionnement « normal » d’une installation nucléaire.

Lors de notre voyage, nous irons capturer les paysages où sont implantées les installations nucléaires et pourrons envisager un futur de ces espaces. Des paysages liés à une certaine dérive peuvent apparaître, l’image en résultant devient rêvée.

Radioisotope et rêves

Radioisotopes ; entre secondes et millions d’années ; ils imprègnent de manière invisible ces paysages devenus nucléaires ; Kychtym[23] ; Tchernobyl[24][25] ; Fukushima[26].

  • 133Xe — Xénon 133 ;
  • 131I — Iode 131 ;
  • 134Cs — Césium 134 ;
  • 137Cs — Césium 137 ;
  • 132Te — Tellure 132 ;
  • 103Ru — Ruthénium 103 ;
  • 106Ru — Ruthénium 106 ;
  • 90Sr —  Strontium 90 ;
  • 140Ba — Baryum 140 ;
  • 95Zr —  Zirconium 95 ;
  • 141Ce — Cérium 141 ;
  • 144Ce — Cérium 144 ;
  • 238U — Uranium 238 ;
  • 239Np — Neptunium 239 ;
  • 238Pu — Plutonium 238 ;
  • 239Pu — Plutonium 239 ;
  • 240Pu — Plutonium 240 ;
  • 241Pu — Plutonium 241 ;
  • 242Cm — Curium 242.

Mines et yellowcake ; stériles miniers et résidus[27], l’uranium s’est transformé, ces radioisotopes diffusent et transforment cet espace, le continuum nucléaire devient présent, nous pouvons dorénavant le traverser.

  • 210Pb — Plomb 210 ;
  • 210Po — Polonium 210 ;
  • 222Rn — Radon 222 ;
  • 226Ra — Radium 226 ;
  • 230Th — Thorium 230 ;
  • 231Pa — Protactinium 231.

Lent voyage nucléaire, parfois hors échelle historique. Le rêve devient présent, nous oublierons ces déchets vitrifiés (HAVL)[28] dans ces futurs stockages au sein des couches géologiques d’argiles profondes[29] ; pourtant l’éternité est impossiblement prévisible.

Paysages invisibles.
Paysages que l’on ne veut pas voir.
Paysages artificiels, notre résidu.
Neptunium 237.
2,144 Ma.

Remerciements à Roland Desbordes pour sa relecture.

Article rédigé par dans Réflexions.
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