K et SMC

Le choix des optiques a été très important dès la genèse du projet, que ce soit d’un point de vue du rendu plastique ou par rapport au questionnement lié à l’éco-responsabilité dans le choix du matériel. Je vais expliquer mon choix de partir avec des objectifs de la série K de Pentax.

L’histoire de la série K

À partir de 1975, Pentax introduisit une nouvelle monture pour ses appareils photos reflex : la monture K (pour King), qui remplaça la monture à vis M42[1] (mais le M42 restait compatible via un adaptateur M42/K).
Au cours d’une courte période de transition entre 1975 et 1977, l’opticien produisit une première série d’optiques adoptant la monture K. Même si elle ne portait pas de dénomination commerciale, cette série fut nommée K a posteriori pour la différencier de la série M (pour Manuelle) qui la remplaça à partir de 1977.

La série K a deux spécificités majeures : les formules optiques ont été quasiment toutes reprises des productions précédentes M42 et cette série était composée principalement de focales fixes (34 focales fixes et 7 zooms). La série M (22 focales fixes et 7 zooms), qui la remplaça, adopta très largement des formules optiques recalculées pour gagner en compacité au détriment d’une construction plus légère, mais toujours fiable.

J’ai fait le choix de deux optiques de cette série K : le SMC PENTAX 1:3.5/28 et SMC PENTAX 1:5.6/400. Pour leur construction de haut vol et leurs formules optiques uniques qui induisent des rendus plastiques particuliers, comme nous le verrons par la suite.

L’éco-durabilité de la monture K

Pentax a fait le choix de conserver la compatibilité des anciennes optiques. En effet l’opticien a su faire évoluer en douceur la monture K à travers neuf versions[2] depuis son introduction en 1975. Mais l’on peut toujours monter des optiques datant de 1975 sur un boîtier de dernière génération sans trop de restrictions. (L’exposition sera manuelle pour les séries K (1975) et M (1977), mais à partir de la série A (1984), un boîtier actuel pourra gérer l’exposition grâce à la position A de la bague de diaphragme.)

Cette philosophie qui permet à l’utilisateur de conserver son parc optique à travers les années est un excellent point concernant l’éco-durabilité du matériel. Ces optiques manuelles ont été produites une seule fois et sont réutilisables presque ad vitam æternam. Leurs capacités optiques peuvent parfois être dépassées à cause de l’ajout (parfois inutile) de mégapixels aux capteurs numériques. Mais malgré cela, elles peuvent toujours être techniquement utilisées.
Cette attention portée à la compatibilité et durabilité du matériel par Pentax est d’autant plus louable que tous les opticiens ne l’ont pas, loin s’en faut.

Nous avons donc choisi ces 28 et 400 mm (produits entre 1975 et 1977). Ces objectifs ne sont constitués que de métal et de verre, qui sont des matériaux durables et recyclables. De plus, ces objectifs sont dénués d’électronique, ce qui exclut les pannes liées aux composants électroniques durant le voyage.

Un objectif totalement manuel

Le SMC PENTAX 1:5.6/400 est l’un des premiers objectifs ayant une monture K. Il fut produit de 1975 à 1977. Pentax fit le choix d’adapter ses optiques M42 en monture K. Le SMC PENTAX 1:5.6/400 est en réalité un Super-Multi-Coated Takumar 400/5.6  avec une monture K et une légère modification du design ; leurs formules optiques sont donc identiques.

Les objectifs de la série K possèdent deux types de diaphragme :

  • Un diaphragme automatique qui permet une transmission mécanique entre le boîtier et l’objectif. On peut ainsi sélectionner l’ouverture sur la bague de diaphragme et la visée s’effectue à pleine ouverture. On retrouve cela sur le SMC PENTAX 1:3.5/28 (figure 2 sur la photo ci-dessous).
  • Un diaphragme manuel, à l’inverse, ne dispose pas de transmission mécanique entre le boîtier et l’objectif. La visée s’effectue à ouverture réelle : plus on ferme plus la visée s’assombrie. Ce système mécanique simplifié est présent sur le SMC PENTAX 1:5.6/400 (figure 3 sur la photo ci-dessous).

Cette différence de type de diaphragme est expliquée dans le manuel SMC PENTAX Objectifs[3] datant des années 80. Mais ce 400 mm fait partie des exceptions, une grande majorité des objectifs de la série K adopteront un diaphragme automatique.

De plus, n’ayant que très peu de pièces mobiles et aucune transmission mécanique, cela en fait un objectif très solide et fiable : il pourra nous accompagner dans de mauvaises conditions grâce à sa construction totalement métallique. C’est le seul 400 mm produit par Pentax qui possède ces caractéristiques et ses successeurs adopteront une transmission mécanique classique.

Formule optique

J’ai choisi cet objectif en particulier pour ces particularités mais aussi pour la composition de sa formule optique composée de 5 éléments en 5 groupes.

© Bojidar Dimitrov

Cette simplicité optique génère un rendu particulier à la fois relativement précis dans l’infini…

… et dont le flou optique pourrait se rapprocher d’un sfumato[4] plus la défocalisation est forte. Ce flou sans complexité superflue mêle la réalité et les artefacts optiques, il agit comme un prisme venant diffracter la réalité. Le réel dérive au-delà de l’imperceptible des ondes du visible.

Mais contrairement au SMC PENTAX 1:3.5/28 qui a vraiment deux états de mise au point – une pour l’inventaire et une pour la dérive, ce téléobjectif a une latitude plus importante au niveau de la dérive, que nous définirons lors du protocole K-400.

Le traitement SMC

Conjointement à la monture K développée à partir de 1971, Pentax travailla avec Zeiss au développement d’un traitement multicouche . Ce dernier devait permettre une meilleure transmission des rayons lumineux en fonction de certaines longueurs d’ondes.
C’est ainsi que fut produit la première génération de Super-Multi-Coated ou SMC[5] et le traitement T* de chez Zeiss. Les Super-Multi-Coated Takumar[6] sont les premiers objectifs de Pentax à bénéficier de ce traitement.

Le traitement SMC ne cessa d’évoluer, des améliorations furent apportées à chaque série d’objectifs (M ; A ; F ; FA ; DFA ; DA). Nous pouvons les reconnaître grâce à la dominante colorée du traitement qui se traduit par une irisation particulière des lentilles. La série K aura tendance à tirer vers le vert et le bleu alors que la série M aura comme dominante le violet et l’orange.

À gauche : SMC PENTAX-M 1:2 35mm ; à droite : SMC PENTAX 1:3.5/28 ; en bas : SMC PENTAX-DA 1:2.8 40mm Limited.

Comme nous l’avons compris précédemment, chaque traitement SMC transmettra de manière différente les rayons lumineux au sein des lentilles de l’optique. Ainsi le rendu final sera différent en fonction du traitement SMC : les aberrations chromatiques[7] seront de natures différentes ainsi que les rendus de la couleur et du contraste.

Les objectifs de la série K possèdent des aberrations chromatiques de même nature tirant vers le bleu et le vert. Correctement retravaillées, elle permettent d’amplifier le point de vue de la dérive, rajoutant de l’abstraction dans l’image. Du fait de la défocalisation opérée sur les objectifs, les rayons lumineux issus du visible et les artefacts créés par la formule optique viennent se mêler, fusionner ; le visible laisse place aux infra-réalités. L’abstraction est générée au sein même du procédé optique. Voici comme vient se former une image de dérive. Moments optiques.

Exemple de dérive au SMC PENTAX 1:5.6/400

  1. M42 sur Wikipédia. 
  2. Versions de la monture K sur Wikipédia. 
  3. Photos du livret SMC PENTAX Objectifs sur Flickr. 
  4. Sfumato sur Wikipédia. 
  5. Traitement SMC sur PentaxZone.free.fr. 
  6. Takumar sur Takumar - The eyes of the Spotmatic. 
  7. Aberration chromatique sur Wikipédia.